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Vendredi de la 4ème semaine du Temps Pascal

Actes 15, 5-35

Les débuts de l’Eglise : la libre initiative de l’Esprit

Père Divo Barsotti

Les Actes des Apôtres, p. 334s

 

          Le concile de Jérusalem a eut lieu en l’an 51. L’Eglise de Jérusalem  a son organisation avec, à sa tête, Jacques, frère du Seigneur. Pierre, quittant Jérusalem, est devenu plus visiblement le chef de tous les disciples, de toute l’Eglise. C’est pourquoi le livre des Actes a raconté comment Pierre a été le premier à introduire dans l’Eglise un païen, Corneille, et a mangé avec lui.

          Après Pierre, Paul a fondé lui aussi de nouvelles communautés dont les membres sont venus directement du judaïsme. Déjà l’Eglise d’Antioche n’avait, à sa tête, que des prophètes et des docteurs : ce sont des charismatiques, il n’y a parmi eux, ni l’un des Douze, ni même l’un des sept diacres. Ce charisme n’est garantit que si les apôtres le reconnaissent. C’est pourquoi Paul et Barnabé sentent la nécessité d’aller à Jérusalem. L’institution que le Christ a voulue n’est pas paralysante, elle n’étouffe pas la libre initiative de l’Esprit qui suscite des hommes pour une action efficace de salut et de renouvellement.

          L’Eglise d’Antioche a été créée par les prophètes, mais en dépendance des Douze. Le concile de Jérusalem est important, non seulement pour que la communauté des fidèles acquierre une pleine conscience de son autonomie par rapport au judaïsme, mais tout autant pour qu’elle acquierre également une claire conscience de son unité. Jacques et Paul peuvent se sentir unis par la présence de Pierre.

          C’est Pierre, avec Jacques, qui convoque l’Eglise. Après le récit de Paul et de Barnabé, toute l’assemblée approuve ce qu’a dit Pierre. C’est de lui que Paul attend la décision. Dans la lettre aux Galates, outre Pierre, Paul mentionne aussi Jean. Pour la dernière fois dans les Actes, ces deux disciples sont mentionnés, et c’est pour approuver le charisme de Paul. L’exercice suprême de la primauté de Pierre se manifeste dans les Actes par l’introduction de Corneille dans l’Eglise, nous l’avons vu, par le discours de la Pentecôte aussi, mais peut-être et surtout quand il reconnaît le charisme de Paul.

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3° lecture Fête de l’apôtre et évangéliste saint Marc

Marc 16, 15-20

L’apostolat : évangéliser et sanctifier les hommes

Vatican II

L’apostolat des laïcs, p. 502s

 

          La mission de l’Eglise concerne le salut des hommes, qui s’obtient par la foi au Christ et par sa grâce. Par son apostolat, l’Eglise et tous ses membres doivent donc d’abord annoncer au monde le message du Christ par leurs paroles et leurs actes, et lui communiquer sa grâce. Cela s’accomplit principalement par le ministère de la parole et des sacrements. Confié spécialement au clergé, il comporte pour les laïcs un rôle propre de grande importance, qui fait d’eux les coopérateurs de la vérité. Dans ce domaine surtout l’apostolat des laïcs et le ministère pastoral se complètent mutuellement.

          Les laïcs ont d’innombrables occasions d’exercer l’apostolat d’évangélisation et de sanctification. Le témoignage même de la vie chrétienne et les œuvres accomplis dans un esprit surnaturel sont puissants pour attirer les hommes à la foi et à Dieu ; le Seigneur dit en effet : Que votre lumière brille devant les hommes pour qu’ils voient vos bonnes œuvres et glorifient votre Père qui est aux cieux.

          Cet apostolat cependant ne consiste pas dans le seul témoignage de la vie : le véritable apôtre cherche les occasions d’annoncer le Christ par la parole, soit aux incroyants pour les aider à cheminer vers la foi, soit aux fidèles pour les instruire, les fortifier, les inciter à une vie plus fervente, car la charité du Christ nous presse. C’est dans les cœurs de tous que doivent résonner ces paroles de l’apôtre Paul : Malheur à moi si je n’évangélise pas.

          A une époque où se posent des questions nouvelles et où se répandent de graves erreurs, le concile exhorte instamment les laïcs, chacun suivant ses talents et sa formation doctrinale, à prendre une part plus active dans l’approfondissement et la défense des principes chrétiens comme dans leur application adaptée aux problèmes de notre temps.

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2° lecture Fête de l’apôtre et évangéliste saint Marc

Actes 5,12-32 ou Ephésiens 4, 1-16

Une Lectio Divina

Père David-Marc d’Hamonville

Marc, l’histoire d’un choc, p. 10s

 

          Marc est l’homme qui a inventé l’évangile. Cet évangile, par son cœur, sa bouche et sa plume, a pris cette forme que nous lui connaissons : un récit, à une parole à nous adressée, qui nous raconte un événement unique, extraordinaire : Jésus de Nazareth.

            Aujourd’hui l’évangile est un récit trop connu, trop familier, il nous est servi tiède, confortable, sans rien qui dérange beaucoup, monnayé en petites coupures le plus souvent, les péricopes liturgiques, de si courtes séquences que l’on aurait mauvaise grâce de s’impatienter.

            Mais la vérité de l’évangile est analogue à la suffocation baptismale : état de celui dont la tête vient d’être maintenue sous l’eau, juste un peu trop de temps, et qui reprend souffle après avoir paniqué, en suffoquant, en s’étranglant, en riant et en pleurant d’un même râle et hoquet, comme un bébé…

            Pour parler, il faut arrêter de crier. Cela prend du temps. Marc aura longtemps crié. Parce que le choc avait été incroyablement fort. En ce temps-là, i n’y avait pas de service d’écoute post-traumatique, les cliniques n’existaient pas…

            Il est impossible de faire revivre ce choc, encore plus impossible de le transmettre. Il ne restait que la stupeur. Alors Marc a écrit la stupeur. Il a accepté d’être le passeur stupide de la vérité la plus lumineuse qui soit. Il a proposé à ses lecteurs d’emprunter le chemin de la stupeur : ils verront bien par eux-mêmes.

            La Lectio Divina a elle aussi, quelque chose de stupide. Il en va d’une belle lecture comme du voyageur qui est parti sans préparer le moins du monde son voyage : il n’avait pas de billet, aucun recommandation, il est monté dans cet avion, puis il a pris ce pont, là, à la fin de l’avenue, il ne connaît pas cette ville, non, il ne se rappelle pas la destination de ce voyage, il avait seulement pris la décision de partir. Depuis le début, tout l’étonne. Il ne sait pas du tout la durée de l’étape en cours.

            Ce qui différencie la Lectio de l’étude, c’est la liberté qui est instituée dès le départ : il n’y a pas de plan de voyage, pas de programme, aucune digression n’est prohibée, aucun détour n’est considéré comme une errance, aucun retard n’est sanctionné ; cela prendra du temps, tout le temps qu’il faut. Toute la personne est convoquée : pas seulement la tête, mais le corps, la mémoire ; pour approcher de la chair du texte, il faut se dévêtir soi-même par moments : le texte est bien, comme le dit l’étymologie, un textile, un tissu, à ressentir à même la peau. Lire est une expression transformante.

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Mercredi de la 4ème semaine du Temps Pascal

Actes 13,44 – 14,7

Une rupture symbolique

Daniel Marguerat

La première histoire du christianisme : Les Actes des Apôtres, p. 219s

 

          Les commentateurs ont rapproché le commencement du ministère de Jésus (Luc 4,16-30) du commencement de la mission paulinienne (Actes 13,13-52). Même lieu : une synagogue. Même intérêt des auditeurs dans un premier temps : ils admirent. Même rejet dans un second temps : Jésus manque d’être tué. En quoi ce texte fonctionne-t-il comme un modèle ? Premièrement, parce que l’opposition Israël/nation y est travaillée par l’exemple des grâces offertes aux païens au travers d’Elie et d’Elisée (Luc 4,24-27) ; comme il aime à le faire, Luc compose ici un tableau où il anticipe une vérité encore à venir dans l’ordre du récit, qui est le rejet de la Parole par Israël et son accueil par les nations. Secondement, l’épisode fonctionne comme modèle, parce que le destin de Jésus y est interprété à l’aide du motif du prophète rejeté par les siens. Luc met en place ici une typologie du prophète qui fonctionnera comme une catégorie centrale de sa christologie. Il appartient au destin du prophète, comme de Jésus, comme de Paul, d’être rejeté par les siens. Mais il n’appartient pas au prophète, ni à Jésus, ni à Paul, de rejeter ce peuple.

          Ce modèle du prophète rejeté a ses règles : il appartient au prophète d’avertir le peuple de Dieu, de le mettre en garde, de le menacer. Non que le peuple serait maudit, mais parce qu’il est en péril, et que le prophète lutte pour le faire vivre. Le prophète ne déclare pas que Dieu a abandonné son peuple, Dieu au contraire ne l’a pas abandonné, et c’est bien pourquoi il lutte pour le faire changer de comportement. L’effet rhétorique de la parole du jugement d’Isaïe 6,9-10 à la fin des Actes (28,26-27) s’inscrit dans la même perspective.

          Ainsi, à la crise déclenchée par sa mission aux non-juifs, Paul réagit d’une part en revendiquant, pour son action, l’appui des Ecritures, d’autre part en refusant de s’accommoder d’une rupture dont il n’assume pas la responsabilité. La rupture voulue par la Synagogue conduit Luc à renforcer les indicateurs de continuité théologique : l’octroi du salut aux païens n’opère pas contre Israël, il ne remplace pas les promesses faites à Israël. L’universalité du salut naît de l’histoire même d’Israël où elle trouve sa source et sa légitimité (Actes 13,32-39), mais cette ouverture est paradoxalement mise en œuvre dans l’histoire par le refus des Juifs de la mission chrétienne.

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Mardi de la 4ème semaine du Temps Pascal

Actes 13, 14b-43

Discours de Paul dans la synagogue d’Antioche de Pisidie

Père Jean Cantinat

Les Actes des Apôtres, p. 102s

 

            L’abandon de Jean-Marc, qui retourne à Jérusalem, irrite Paul, mais ne le décourage pas. Avec Barnabé, il franchit la chaîne montagneuse du Taurus, marche longuement sur les hauts plateaux et finit par atteindre Antioche de Pisidie, la plus importantes des villes qu’il entend évangéliser. Dès le premier sabbat qui suit son arrivée, il se met à prêcher aux Juifs dans leur synagogue.

          Le livre des Actes nous a conservé un sommaire assez détaillé du premier discours qu’il leur donne, un peu comme s’il s’agissait de son discours inaugural, et comme s’il fallait y voir le reflet de toute sa prédication devant les auditoires juifs. Ce discours, qui rappelle beaucoup celui de Pierre à la Pentecôte, montre que les deux apôtres avaient la même manière d’annoncer l’Evangile à leurs coreligionnaires encore incrédules. Nous voici confirmés dans l’idée qu’il existait aux origines de l’Eglise des prédications types, adaptés aux divers auditoires abordés.

          Chacune des trois parties du discours débute par une apostrophe aux auditeurs. La première partie résume l’histoire sainte d’Israël, comme l’avait fait Etienne, mais dans un autre but. Elle tend à prouver que toute cette histoire, jusqu’au témoignage même de Jean-Baptiste, annonçait la venue de Jésus, Sauveur. La deuxième partie, où se retrouve l’argumentation de Pierre, fait d’abord ressortir le contraste entre l’attitude des hommes qui condamnent Jésus et celle de Dieu qui le ressuscite. Elle rappelle ensuite les apparitions du Ressuscité aux témoins que sont les apôtres et dégage finalement la portée messianique de cette résurrection annoncée par les Saintes Ecritures.

          La troisième partie est une véritable conclusion. D’allure paulinienne, elle n’exhorte à n’attendre la rémission des péchés et la sanctification que de la foi au Christ ressuscité et non de la pratique de la loi mosaïque. C’est la mise au point des insinuations d’Etienne. Une menace contre ceux qui resteraient incrédules vient renforcer la valeur persuasive de la conclusion.

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Lundi de la 4ème semaine du Temps Pascal

Actes 12,24 – 13,14a

L’Eglise d’Antioche missionnaire

Collectif

Une lecture des Actes des Apôtres, CE 21, p. 44s

 

            Quelque chose de nouveau se passe à Antioche : on se met à prêcher directement aux grecs qui se tournent vers le Seigneur, ce qui désigne évidemment des païens. Jusqu’alors, quand Philippe agrandissait la sphère de l’Eglise, quand on voyait Pierre et Jean aller imposer les mains pour faire entrer de nouveaux croyants dans le grand cercle de l’Eglise. Celle-ci semblait se construire par cercles concentriques autour d’un centre : Jérusalem. Ici, à Antioche, on a l’impression de voir naître un nouveau type d’Eglise : elle naît en dehors de Jérusalem, suscitée uniquement par la prédication de la Parole de Dieu et de l’Esprit Saint. Et ce ne sont plus Pierre et Jean qui sont envoyés, mais Barnabé ; parce que c’est un homme droit et rempli de l’Esprit, Barnabé y reconnaît l’œuvre de Dieu et donne sa caution à ce nouveau type d’Eglise ; il va même chercher Paul à Tarse, et tous deux animent cette nouvelle communauté une année durant.

          L’étape décisive dans l’extension de l’Eglise va être franchie par une mission en Asie Mineure dont l’Esprit-Saint prend directement l’initiative. C’est l’Esprit-Saint lui-même, qui, lors d’un culte, demande à l’Eglise d’Antioche d’envoyer Barnabé et Paul.

          La façon d’envisager la mission prend un tournant très net. Jusqu’alors on prêchait la bonne nouvelle aux Juifs. Devant le refus des Juifs, Paul et Barnabé eurent la hardiesse de leur déclarer que, puisqu’ils repoussent la parole divine, ils vont se tourner vers les païens.

          On mesure le chemin parcouru, depuis la communauté de Jérusalem qui ne prêche qu’aux Juifs, jusqu’à cette ouverture de la porte de la foi aux païens par les Hellénistes conduits par l’Esprit. Cela ne pouvait que poser un problème théologique grave : on se laisse conduire par la vie dans laquelle on pense voir l’inspiration de l’Esprit. Mais, ce faisant, est-on fidèle à la pensée de Jésus ? La question devait jaillir un jour ou l’autre ; c’est ce qui se fera à Jérusalem quand Paul et Barnabé y descendront.

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3° lecture Dimanche de la 4ème semaine du Temps Pascal

Jean 10, 11-18

Ecouter et suivre le Bon Pasteur

Saint Augustin

Sermon 46, 13, OC 16, p. 274s

 

            Tous les bons pasteurs sont dans un seul et ne font qu’un avec le pasteur unique Jésus-Christ. Lorsqu’ils conduisent les brebis dans les pâturages, c’est Jésus-Christ lui-même qui les conduit. Ils ne donnent point comme leur parole la parole de l’époux. C’est donc Lui Jésus qui fait paître les brebis ; il peut dire : C’est moi qui les fait paître parce que c’est ma voix qui parle par leur bouche, c’est ma charité qui les anime. Il affermit ainsi leur charité pour consolider l’unité. C’est Lui qui fait paître ses brebis dans la personne de ses pasteurs, et les pasteurs les font paître dans la personne de Jésus-Christ. Les pasteurs cherchent la gloire, mais celui qui se glorifie se glorifie dans le Seigneur. On fait paître les brebis pour Jésus-Christ, en Jésus-Christ et avec Jésus-Christ, lorsqu’on ne cherche pas à se paître soi-même en dehors de Jésus-Christ. Ce n’est point parce que les pasteurs devaient faire défaut, ce n’est point pour prédire des temps malheureux que le prophète, parlant au nom même de Dieu, dit : Je ferai paître mes brebis, parce que je sais à qui les confier. Les apôtres étaient encore vivants et dans ce monde lorsque l’unique Pasteur, dans lequel tous les pasteurs ne font qu’un, disait : J’ai d’autres brebis qui ne sont point de cette bergerie ; il faut aussi que je les amène, et il y aura un seul berger et un seul troupeau. Que tous les pasteurs soient donc réunis dans cet unique Pasteur, qu’ils ne fassent entendre qu’une seule voix, celle du Pasteur. C’est Lui seul que les brebis doivent suivre, et non celui-ci ou celui-là, et tous les pasteurs unis en Lui doivent tenir le même langage, ne point enseigner de doctrine différente. Je vous conjure, disait l’apôtre Paul (1 Corinthiens 1,10), d’avoir tous un même langage, et de ne point souffrir de divisions parmi vous. Cette voix pure de tout schisme, éloignée de toute hérésie, doit être entendue par des brebis qui suivent leur Pasteur, comme il l’a dit lui-même : Mes brebis entendent ma voix et me suivent.

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2° lecture Dimanche de la 4ème semaine du Temps Pascal

Actes 12, 1-23

Exécution de Jacques, le frère du Seigneur

Saint Jean Chrysostome

Sermon 26 sur les Actes des Apôtres, OC 15, p. 98s

 

            Quelle est cette époque dont l’auteur des Actes des Apôtres parle au début de la lecture de ce jour ? Celui qui venait immédiatement après. C’est ainsi qu’il faut l’entendre dans ce texte. Lorsque Matthieu dit, par exemple : En ces jours-là, Jean vint prêcher (3,1), il ne désigne pas les jours qui suivent, mais bien ceux où s’accomplit l’événement qu’il va raconter. Tel est l’usage des Ecritures ; parfois la narration ne laisse pas de lacune, parfois elle se transporte à des faites éloignés comme s’il n’existait pas d’intervalle. C’est avec raison qu’il est dit : Le roi Hérode ; car ce n’est plus celui qui est nommé à l’époque de Jésus.

          Voici donc surgir une autre épreuve. Observez de quelle façon les choses se compliquent, ainsi que je vous le disais au début ! Ce ne sont plus les Juifs, ce n’est plus le conseil de la nation, c’est un roi maintenant qui persécute les disciples. Plus grand est le pouvoir, plus redoutable sera la guerre, surtout parce qu’il cherche à plaire aux Juifs. Il fit mourir par le glaive Jacques, le frère de Jean. C’est sans but et comme au hasard. Si quelqu’un nous demande pourquoi Dieu permit cela, nous répondrons que ce fut pour les Juifs eux-mêmes : d’abord pour bien leur montrer que la mort n’était pas un obstacle à la victoire, comme on l’avait vu dans le martyre d’Etienne ; puis, pour leur inspirer la pensée de revenir de leur frénésie après en avoir suivi l’impulsion ; enfin, pour qu’il fût évident que ces choses mêmes arrivaient parce que Dieu les avait permises.

          Voyant que cela plaisait aux Juifs, il résolu aussi d’arrêter Pierre. Etrange et multiple fureur ! Devait-il donc se les rendre favorables par des meurtres inutiles et sans motif ? C’était le jour des azymes. Vaines prétentions que celles des Juifs ! Bien loin d’empêcher de tels crimes, ils les commettaient durant ces jours sacrés ! Après l’avoir saisi, il le jeta dans une prison, le confiant à quatre troupes de soldats, composées de quatre hommes chacune (3,4). Là se trouvent mêlées la rage et la peur. Vous l’avez vu : Il fit mourir par le glaive Jacques, le frère de Jean. Avez-vous remarqué le courage des disciples ? Pour qu’on ne prétendît pas qu’ils affrontaient la mort sans crainte en l’affrontant sans péril, vu que Dieu les en délivrait, Dieu permit qu’ils fussent réellement immolés, apprenant de la sorte aux meurtriers que ce moyen même n’arrêterait, ni n’entraverait le ministère.

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Samedi de la 3ème semaine du Temps Pascal

Actes 11,19-30

le nom de chrétiens

Père Piere Bockel

Antioche, Bible et Terre Sainte, n° 128, Février 1971, p. 5s

 

          D’après le livre des Actes des Apôtres (11,26), c’est précisément à Antioche, vers l’an 44 après Jésus-Christ, que les disciples de Jésus reçurent le nom de chrétiens (christianoi, en grec). Ce ne sont pas les Juifs qui sont à l’origine de cette appellation, car ils nommaient les disciples Nazaréens (24,5) et ne pouvaient pas appliquer le nom de Christ à des gens avec lesquels ils étaient en désaccord sur la question du Messie, terme que le grec traduit par Christ. D’après l’interprétation la plus courante, ce sont les païens d’Antioche qui, entendant les disciples parler de Christos, l’ont compris comme un nom propre, celui du fondateur de la nouvelle secte (28,22). Il est d’ailleurs curieux de constater que, dans le livre des Actes des Apôtres, le second emploi du terme chrétien est placé dans la bouche du roi Agrippa au moment de son entrevue avec Paul (26,28).

          Dans le Nouveau Testament, on ne retrouve que trois fois le nom de chrétien, mais il est frappant de le rencontrer chez les historiens latins. Tacite (Annales XV,44) utilise ce terme à propos de l’incendie de Rome sous Néron (64 après Jésus-Christ) : Pour anéantir la rumeur, celle d’un incendie allumé par l’empereur, Néron supposa des coupables et infligea des tourments raffinés à ceux que leur abomination faisaient détester et que la foule appelait Chrétiens. Ce nom leur vient de Christ qui, sous le principat de Tibère, le procurateur Ponce Pilate avait livré au supplice ». Ainsi, dans la Rome des années 60, le peuple appelle les disciples de Jésus chrétiens, et parce que l’on ne comprenait pas le sens du mot Christos, on l’a confondu avec celui de Chrestos qui signifie bon.

          Au témoignage de Tacite, on peut ajouter celui de Suétone (Vita Claudii, XXV) qui fait allusion à une décision prise par l’empereur Claude, vers 49 ou 50 : Comme les Juifs se soulevaient continuellement à l’instigation d’un certain Chrestos, il les chassa de Rome (voir les Actes 18,2) : abordant le règne de Néron, il donne cette précision : « On livra au supplice les chrétiens, sorte de gens adonnés à une superstition nouvelle et dangereuse (Vita Neroni XVI) ». Le terme de chrétiens était donc connu à Rome et largement répandu entre les années 50-60.

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Vendredi de la 3ème semaine du Temps Pascal

Actes 10,34 – 11,4+18

le discours de pierre chez corneille

Père Pierre Debergé

Avec Pierre et Paul en suivant les Actes des Apôtres, p. 49s

 

          Répondant à la requête de Pierre qui veut savoir pour quelle raison il l’a fait venir, Corneille évoque alors sa propre vision et comment, sa prière ayant été exaucée, il est prêt, avec ceux qui l’entourent, à écouter tout ce que le Seigneur a chargé Pierre de leur dire. Suit un long discours où Pierre reprend les éléments du kérygme. Mais, s’adressant pour la première fois à d’autres qu’à des Juifs, il reconnaît d’abord la vérité qui vient de s’imposer à lui : Je me rends compte en vérité que Dieu n’est pas partial, et, qu’en toute nation, quiconque le craint et pratique la justice trouve accueil auprès de lui.

          Reconnaître cela, c’est affirmer non seulement que les païens ne doivent plus être considérés comme impurs, mais qu’il existe, en dehors du peuple de Dieu, des hommes et des femmes dont Dieu agrée la conduite et la piété. Comme le montre la déclaration de Pierre qui suit, si ce constat n’annule pas la priorité historique accordée par Dieu au peuple élu, l’offre du salut en Jésus-Christ concerne désormais tous les hommes. Cette universalité du salut a pour fondement historique l’événement Jésus-Christ. Son rappel occupe la suite du discours de Pierre.

          Plus que les discours précédents, Pierre y résume les grandes lignes du ministère de Jésus et sa destinée inséparablement tragique et glorieuse. Evoquant le ministère galiléen de Jésus, deux points sont plus particulièrement soulignés : Dieu lui avait conféré l’onction d’Esprit-Saint et de puissance ; il guérissait tous ceux que le diable tenait asservis, car Dieu était avec lui. On retrouve ensuite, à propos de la croix, la même expression qu’en 5,30, et, au sujet de la résurrection, celle que Luc avait utilisée dans l’évangile : Dieu l’a ressuscité le troisième jour. Mais, davantage que dans les autres discours, Pierre insiste sur l’importance du témoignage confié aux apôtres.

          Renouant avec l’affirmation du début, la finale du discours reflète une nouvelle fois l’ouverture dont Pierre vient de prendre conscience : le pardon des péchés est accordé à quiconque croit en Jésus-Christ. Voilà qui fait tomber toutes les discriminations et met fin à tous les préalables ethnique, rituel ou social : seule la foi suffit.